Bitcoin est-il haram ? Réponse à l’objection de la spéculation excessive
Cet article répond à l’une des critiques les plus fréquentes adressées au Bitcoin dans la communauté musulmane : son caractère supposément spéculatif, et donc potentiellement haram. Il rappelle le principe fondamental de la licéité présumée en Islam et insiste sur la distinction entre l’usage d’un actif et sa nature. À travers une analyse rigoureuse des concepts de maïsir (jeu de hasard) et de gharar (incertitude excessive), l’article démontre que Bitcoin ne remplit pas les conditions pour être considéré comme illicite. Il souligne également que d’autres actifs volatils comme l’or ou le pétrole ne sont pas interdits malgré des usages spéculatifs similaires. L’objectif est d’inviter à une réflexion éthique, informée et cohérente sur l’usage de Bitcoin en tant qu’alternative potentiellement conforme aux principes de la finance islamique.
11/28/20255 min read


Introduction
De plus en plus de musulmans à travers le monde cherchent des alternatives éthiques aux monnaies modernes comme l’euro ou le dollar, dont le fonctionnement repose sur l’usure (riba), l’endettement et l’inflation. Dans cette quête de conformité aux principes de la finance islamique, Bitcoin émerge comme une option intrigante… mais souvent controversée. Nombreux sont ceux, au sein même de la communauté musulmane, qui qualifient cette cryptomonnaie de haram, en particulier à cause de son aspect spéculatif.
Mais cette objection repose-t-elle réellement sur une analyse rigoureuse et fondée sur les sources islamiques ? Dans cet article, inspiré d’un chapitre du livre Bitcoin est-il obligatoire en Islam ?, nous allons examiner l’un des reproches les plus répandus : l’idée selon laquelle Bitcoin serait assimilable au jeu de hasard (maïsir) ou à une incertitude excessive (gharar), deux éléments interdits en Islam. À travers une analyse précise et argumentée, nous chercherons à démêler le vrai du faux.
I. La présomption de licéité en Islam : une règle fondamentale
En matière de jugement religieux, l’Islam repose sur un principe essentiel : toute chose est licite par défaut, sauf preuve explicite de son interdiction. Ce principe, issu de la jurisprudence islamique classique, s’applique aux aliments, aux comportements, mais aussi aux objets et technologies nouvelles. Ainsi, lorsqu’un débat surgit sur la licéité d’un outil comme Bitcoin, la charge de la preuve revient à celui qui en affirme l’interdiction.
Autrement dit, il ne suffit pas de soupçonner Bitcoin d’être haram pour qu’il le soit. Pour qu’une chose soit déclarée interdite (haram), il faut des preuves claires, tirées du Coran, de la Sunna ou des principes établis de la jurisprudence.
Dans cette logique, l’absence de preuve d’illicéité implique une neutralité de départ, voire une licéité présumée. C’est le cas de Bitcoin : en l’absence d’un consensus clair des savants sur son interdiction, il convient de l’envisager comme un outil licite, ou du moins neutre, tant que son usage ne mène pas à un péché en soi.
II. L’objection centrale : Bitcoin serait un actif spéculatif
L’argument le plus fréquent contre Bitcoin au sein de la communauté musulmane est qu’il s’agirait d’un actif purement spéculatif, voire d’un jeu financier semblable au maïsir (jeu de hasard), ou encore entaché de gharar (incertitude excessive), deux pratiques interdites par l’Islam. Selon cette logique, la forte volatilité du Bitcoin, ses hausses et baisses parfois spectaculaires, en feraient un outil dangereux, imprévisible, et donc illicite.
Mais cette objection, bien que largement répandue, nécessite d’être analysée avec rigueur. Car affirmer que le Bitcoin est haram pour cause de spéculation, c’est oublier que la spéculation peut exister autour de n’importe quel actif, y compris des matières premières comme l’or, le pétrole ou le blé. Et pourtant, aucun savant n’a jamais déclaré que l’or devenait haram en raison des paris financiers placés sur sa valeur.
De plus, les concepts de maïsir et de gharar ont des définitions précises dans la jurisprudence islamique. Les appliquer à Bitcoin de manière superficielle, simplement en raison de sa volatilité, revient à tordre le sens des textes. C’est pourquoi il est nécessaire de faire la distinction entre l’outil lui-même et l’usage qu’on en fait.
III. Distinguer l’outil de l’usage : la clé de la compréhension
Une erreur fréquente consiste à confondre l’objet avec son usage. En matière de droit islamique, cette distinction est essentielle. Ce n’est pas parce qu’un bien est utilisé de manière abusive ou immorale qu’il devient illicite en lui-même. Par exemple, il est possible de spéculer de façon excessive sur des biens parfaitement licites comme l’or, le blé ou le pétrole. Pourtant, ces matières premières ne sont pas haram par nature.
Il en va de même pour Bitcoin. Le fait que certains l’utilisent pour faire du trading intensif, voire du pari sur son évolution future, ne transforme pas la cryptomonnaie elle-même en produit illicite. Ce sont les comportements abusifs qu’il convient de réprouver, pas la technologie sous-jacente.
Sinon, il faudrait condamner de la même manière toute forme de monnaie, de matière première ou même d’action cotée en bourse. Ce serait incohérent du point de vue de la jurisprudence islamique.
IV. Bitcoin, spéculation… ou simple logique de marché ?
Certes, le prix du Bitcoin connaît une volatilité importante. Mais faut-il pour autant l’assimiler à un jeu de hasard ? La réponse, selon les critères islamiques, est non.
La fluctuation des prix est normale dans tout marché libre. Elle résulte du jeu de l’offre et de la demande. Lorsqu’un grand nombre de personnes souhaitent acquérir du Bitcoin, son prix augmente. À l’inverse, lorsqu’elles veulent vendre massivement, son prix baisse. C’est la mécanique classique du commerce, la même que pour n’importe quel actif marchand.
Contrairement au maïsir, qui repose sur le hasard pur, le prix du Bitcoin est déterminé par des facteurs concrets : l’énergie dépensée pour le miner, les coûts d’infrastructure, l’adoption, etc. Il ne s’agit donc pas d’un jeu à somme nulle.
Acheter du Bitcoin à un certain prix pour le revendre plus tard, en assumant le risque de perte ou de gain, relève de la logique commerciale légitime. Ce type de risque est accepté en Islam, tant qu’il ne repose pas sur l’injustice ou la tromperie.
V. Qu’en est-il du gharar ? La transparence de Bitcoin face aux règles islamiques
En Islam, le gharar désigne une forme d’incertitude excessive dans les transactions. Toute opération commerciale doit être fondée sur la transparence, la clarté des conditions, et la connaissance mutuelle des éléments échangés.
Mais rien de tel n’existe dans une transaction en Bitcoin. Lorsqu’un utilisateur achète ou vend des bitcoins, il sait exactement :
Ce qu’il échange,
À quel prix,
Avec qui,
Et à quelle vitesse la transaction sera confirmée.
La nature de l’actif est claire, traçable, immuable. Ce n’est pas l’incertitude du prix qui rend une transaction interdite, mais celle de l’objet ou des termes du contrat. Or, Bitcoin respecte précisément ces exigences de clarté.
VI. Ce que dit la jurisprudence islamique : cohérence et comparaisons
La jurisprudence islamique repose sur la cohérence et l’analogie. Si l’on affirme que Bitcoin est haram en raison de sa volatilité, il faudrait logiquement appliquer la même règle à l’or, au blé, au pétrole ou à d’autres marchés spéculatifs.
Pourtant, aucun savant n’a jamais interdit ces actifs. Cela démontre que l’Islam distingue bien l’objet neutre des usages illicites. De plus, certaines fatwas modernes reconnaissent que Bitcoin peut être licite, selon l’usage qu’on en fait.
Dans un monde où les monnaies Fiat elles-mêmes posent problème (riba, inflation), rejeter Bitcoin sans étude sérieuse serait injuste et incohérent.
Conclusion
Accuser Bitcoin d’être haram à cause de la spéculation revient à confondre un outil neutre avec l’usage qu’on en fait. En Islam, c’est la justice, la transparence et la clarté qui priment dans l’évaluation d’un contrat ou d’un actif.
Or, à la lumière de ces critères, Bitcoin ne relève ni du maïsir, ni du gharar, ni d’un système illicite. Il mérite donc une évaluation sérieuse et équilibrée, non un rejet impulsif. Pour aller plus loin, télécharge gratuitement le livre Bitcoin est-il obligatoire en Islam ? et explore cette alternative monétaire à la lumière de ta foi.
